Lettre ouverte au Ministre bruxellois de l’Environnement et la Transition climatique Alain Maron et au Ministre-Président Rudi Vervoort

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Bruxelles, 11 janvier 2021

Sujet: Déversements d’eau polluée dans la Senne et le canal

Monsieur le Ministre Maron, Monsieur le Ministre-Président Vervoort,

Le nouveau Plan de Gestion de l’eau 2022-2027, la troisième édition, est en passe d’être finalisé. Ce plan de gestion, requis par l’Union européenne, vise à définir les lignes directrices qui devraient permettre à Bruxelles d’atteindre les objectifs fixés pour 2027 dans la directive-cadre européenne sur l’eau, c’est-à-dire l’atteinte du bon état des eaux souterraines et de surface. Aujourd’hui, l’état de certains cours d’eau bruxellois n’est toujours pas bon. La Senne et le canal, par exemple, reçoivent fréquemment de l’eau polluée via les trop-pleins des égouts, et ce toute l’année durant. Au total, il s’agit de 10 millions de m3 par an, sans compter les 6 millions de m3 qui passent par les stations d’épuration pour n’y être que sommairement filtrés quand le volume d’eau dépasse la capacité maximale en temps de pluie (pour référence, les deux stations d’épuration traitent à elles deux 125 millions de m3 par an). Ces déversements disproportionnés n’amènent pas seulement quantité de déchets visibles dans le canal et la Senne (plastique, rats morts etc.) mais ils sont surtout néfastes pour la qualité de l’eau. Tous les efforts futurs pour améliorer la biodiversité de ces cours d’eau, citons par exemple la mise à découvert de la Senne au Parc Maximilien, risquent de manquer leur cible si l’utilisation des trop-pleins n’est pas fortement réduite. La ville de Paris a aussi fait face, dans les années 80, à des déversements d’égouts de l’ordre de 15 à 20 millions de m3 par an mais ils ont pu être réduits grâce à de gros investissements et tournent aujourd’hui autour de 1 à 3 millions de m3 par an. Après complétion du projet Austerlitz en 2023, il ne devrait presque plus y avoir de déversements dans la Seine.

Nous demandons une reconnaissance de la gravité de ce problème environnemental à Bruxelles et plus d’ambition politique pour sa résolution. Les interventions planifiées actuellement, telles que la gestion dynamique des bassins d’orage existants, le rehaussement des seuils des troppleins et l’installation d’appareils de mesure, sont loin d’être suffisantes pour atteindre les objectifs fixés par la directive-cadre. Aujourd’hui, le discours politique s’oriente vers des mesures de gestion intégrée de l’eau de pluie mais il n’existe pas non plus de plan concret en vue du respect des objectifs mentionnés ci-dessus. Qui plus est, dans des aménagements récents, comme celui de la Place Rogier et de la Place Jourdan, pour n’en citer que deux, rien n’est prévu pour l’eau de pluie qui continue d’être évacuée via les égouts!

C’est pourquoi nous demandons que les points suivants soient repris dans le Plan de Gestion de l’eau 2022-2027:

  • La mention que ce plan de gestion a pour but le respect de la directive-cadre européenne pour tous les cours d’eau bruxellois d’ici 2027, sans revoir à la baisse les objectifs pour la Senne.
  • La commande d’une étude sur tout le territoire de Bruxelles afin d’évaluer l’impact du changement climatique sur les précipitations dans les 100 années à venir ainsi que le coût des dégâts occasionnés par les inondations dues à des pluies plus intenses.
  • La commande d’un plan concret pour tout le territoire de Bruxelles déterminant les interventions nécessaires pour éviter les déversements d’eau polluée et les inondations dans les 100 années à venir, avec une date butoir pour sa réalisation. Ce plan ayant pour objectif principal d’éviter que les eaux pluviales n’arrivent dans les canalisations via l’étude de solutions intégrées et traditionnelles. Le coût total des interventions nécessaires pourra ainsi être mis en
    perspective avec le coût des dégâts occasionnés par les inondations dans les 100 années à venir.
  • La promesse de la mise à disposition du budget nécessaire et de l’élaboration d’un plan multiannuel pour l’exécution des différents projets, petits et grands.

Aujourd’hui, Bruxelles fait face à un sérieux problème environnemental. Pour permettre aux instances responsables de le solutionner, une réelle ambition politique ainsi que la mise à disposition des moyens requis, financiers et autres, sont indispensables. La comparaison entre le coût des dégâts futurs estimés et l’investissement nécessaire pour les éviter pourrait apporter un éclairage différent voire même révéler un bilan positif. Soyons ambitieux, les Bruxellois méritent des cours d’eau pleins de nature et de biodiversité dans leur ville.

Signataires: Canal It Up, Escaut Sans Frontières (projet Canal Corridor Ecologique), Coordination Senne, Natuurpunt Brussel, Surfrider Foundation, Natagora Bruxelles, Jeunes et Nature, Union Nautique de Bruxelles, Cercle des régates Bruxelles kayak, Pool is Cool, Roodbaard, BRAL, Bûûmplanters, WWF en Greenpeace Brussels.

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